LES CHRONIQUES DE LA SECONDE GUERRE MONDIALE

CHRONIQUES


L’AVIATION FRANÇAISE DANS LA CAMPAGNE DE FRANCE

L'armée de l’air française n’a pas été absente du ciel de la France pendant les terribles journées de mai et juin 1940. Plus de mille avions allemands furent abattus par les français entre 1939 et 1940, tandis que près de 200 pilotes français périrent au cours de leurs missions.

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Bombardiers français Amiot 143 rejoignant leur base, mai 1940

En septembre 1939, l’aviation française n’est pas prête à la guerre. Sur les 7800 avions environ dont elle dispose, seul 890 d’entre eux sont en état de combattre. Conception stratégique périmée, retard dans le programme de réorganisation et de modernisation, autant de raisons qui empêchent l’armée de l’air de pouvoir rivaliser avec la Luftwaffe. De plus le fonctionnement de l’aviation française est entravé par la dilution des responsabilités entre les forces aériennes de réserve, les forces aériennes de coopération et les groupes de chasse qui dépendent soit des commandants de groupement de l’aviation de réserve, soit des commandants des force aériennes de l’armée de terre. L’aviation allemande ne connaît pas ses problèmes puisque elle est une arme homogène avec un commandement unique.

Au printemps 1940, l’industrie aéronautique française produit 500 appareils nouveaux par mois. Même si ses derniers ne sont pas toujours prêt pour le combat, pour certains il manque la radio, pour d’autres, le dégivrage, leur nombre croissant peut devenir assez rapidement une menace pour l’aviation allemande. Au 10 mai 1940, l’aviation française aligne près de 600 chasseurs monoplaces rapides et bien équipés comme le Morane-Saulnier 406, le Bloch MB 151 et le Dewoitine 520. Elle compte également 100 chasseurs biplaces Potez 63, environ 150 bombardiers, 450 appareils de reconnaissance, soit un total de 1300 avions modernes auxquels s’ajoutennt 400 appareils britanniques, 234 belges et 139 hollandais. L’ennemi dispose de près de 3500 avions.

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Avion Bloch  MB151  détruit

Les français ont choisi de ne pas concentrer leur aviation sur un point de la bataille. Ainsi, de la Manche à la frontière Suisse, seulement 1000 appareils sont disponibles. En outre la stratégie demeure défensive. Donc priorité est donnée aux avions de chasse et de reconnaissance, alors que les Allemands prévilégient l’attaque de masse. Pendant la drôle de guerre, l’aviation de chasse française a abattu 74 avions allemands. Le 6 novembre 1939, dix Messerchmitt ennemis sont descendus par des Curtis lors d’un combat aérien au-dessus de la Lorraine. À la veille du 10 mai, la chasse française a déjà effectué plus de 10 000 sorties : seize pilotes sont morts, 80 victoires son homologuées et 63 appareils français sont détruits. Contrairement à une légende tenace, l’aviation française n’a pas été absente du ciel pendant les terribles journées de mai et juin 1940, mais les combats se sont déroulés souvent à plus de 2000 mètres d’altitude. Avec plus de 20 000 sorties, combattant à un contre deux, les pilotes français rivalisent de courage et d’adresse. Le 10 mai l’aviation française abat 49 appareils allemands et en perd 9. Mais c’est au sol que les dégâts sont énormess car les Allemands bombardent par surprise les aérodromes militaires français. Dans les Ardennes, l’ennemi concentre 320 bombardiers, essentiellement des Stuka et des Messerchmitt.

En face, l’aviation française ne peut compter que sur 20 chasseurs. Le 14 mai 170 bombardiers franco-britanniques vont se succéder au-dessus de Sedan pour détruire les ponts sur la Meuse. En vain. 85 appareils sont détruits. Du 16 au 23 mais les chasseurs français font 2640 sorties, abattant 159 appareils ennemis et perdant seulement 30 avions. Mais ils ne peuvent empêcher la percée allemande et le bombardement systhématique des aérodromes, des centres ferroviaires, des usines et des routes.

Le 5 juin il ne reste plus que 340 chasseurs opérationnels dans les rangs français. Malgré tout, ce jour voit la chasse française abattre 66 avions ennemis, un record. Les pilotes tricolores doivent voler de plus en plus longtemps, souvent sans repos. Mais ils se battent avec énergie et remportent toujours de nombreuses victoires. Berlin est bombardée dans la nuit du 7 au 8 juin par un Farman de l’aéronavale. Près de 90 bombes tombent sur la capitale du Reich. Des raids sont également menés en Italie, sur Turin, Rome, la Sardaigne.

Sur 800 pilotes français engagés dans les combats, près de 200 sont tués, 188 blessés et 31 faits prisonniers. Les quelques 1000 avions allemands abattus par les Français entre septembre 1939 et juin 1940 vont faire cruellement défaut à la Luftwaffe lorsque la bataille d’Angleterre va commencer au cours de la seconde partie de l’été 1940.


20/12/2013
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LES ÉDITEURS ET LES IMPRIMEURS DANS LA RÉSISTANCE

Pour lutter contre la propagande allemande, la Résistance se lance dans une guerre d’information; journaux, tracts, brochures, affichettes, papillons. Très vite conscients de l’impact que ces publications peuvent avoir sur la population, l’occupant et la police française pourchassent l’écrit clandestin. Les saisies, la fermeture des centres d’impression, les arrestations sont répertoriées dans les rapports de police. La répression est féroce contre ceux, imprimeurs journalistes et responsables d’édition, qui portent ces paroles de liberté.

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Machine d’imprimerie de Défense de la France, camouflée sous une caisse d’expédition

La propagande a été l’une des armes les plus redoutables du nazisme. En France, dans la zone occupée, les services allemands organisent efficacement leur propagande, supervisée depuis Berlin par deux départements bien distincts : d’une part, la Propaganda Abteilung de Goebbels, qui a installé ses bureaux à Paris à l’hôtel Majestic, d’autre part, les services du docteur Dietrich, qui agit comme chef de la presse du Reich et a sous son contrôle les agences de presses. En zone Sud, le gouvernement de Vichy met progressivement en place des services de censure aux niveaux régional, départemental et local. Après le retour de Pierre Laval au gouvernement le 18 avril 1942, Vichy mène une politique active pour développer un mouvement corporatif de la presse.

Les censures françaises et allemandes s’exercent dans tous les domaines: plusieurs listes d’ouvrages interdits aboutissent à la suppression de plus de mille titres et au retrait de millions d’exemplaires. La première, la liste Bernhard, préparée à Berlin et Leipzig date de l’été 1940: elle interdit 143 titres à caractère politique, dite antiallemands, antinazis, mais aussi et surtout écrit par des Juifs. 700 000 volumes sont saisis avant la fin du mois d’août.

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Michel Bernstein fabriquant des faux-papiers

En octobre 1940, la liste Otto (du nom de l’ambassadeur Otto Abetz) énumère les livres français à proscrire; elle recense les noms de 140 éditeurs et, parmi les auteurs, entre autres, Duhamel, Aragon, Kessel, Maurois, Claudel, Malraux, Jacques Bainville, Henry Bordeaux. D’autres listes seront publiées par la suite. Les éditeurs essentiellement pour des raisons économiques désirent reprendre le cour normal de leurs activités et se déclarent prêts à transiger avec l’occupant pour débloquer la situation. Bernard Grasset prend l’initiative de négocier les conditions d’arrangement. Le résultat est la convention d’auto-censure, signée le 28 septembre 1940 par le président des syndicats des éditeurs, René Philippon, selon laquelle ces derniers sont libres de publier ce qu’ils veulent, à condition de ne rien faire paraître qui puisse nuire aux intérêts des allemands. Cette convention fonctionne jusqu’en 1942 : elle permet aux éditeurs de poursuivre leur activité à peu près normalement et aux autorités allemandes de rejeter la responsabilité de la censure sur eux, en déclarant qu’ils assainissent eux-mêmes la litérature. La liberté relative des éditeurs se restreint à partir d’avril 1942 : la Commission de contrôle de papier a en effet un très grand pouvoir, étant donné qu’elle a la double mission d’attribuer le papier et d’exercer la censure.

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L’Humanité du 20 juillet 1941

Conscients de l’impact de l’information sur la population, les premiers résistants reprennent à leur compte l’arme de l’ennemi, la propagande. Dès le 17 juin 1940, Edmond Michelet dépose dans les boîtes à lettres de Brive, un tract reproduisant un texte de Charles Péguy (L’Argent) : Celui qui ne se rend pas a raison contre celui qui ce rend. Jean Texcier écrit en juillet 1940 les Conseils à l’occupé. Première brochure clandestine ironique, imprimée en août chez Keller, rue Rochechouart, à Paris, elle incite au refut de toute compromission avec l’occupant. La presse clandestine fait ses débuts, en général, sous forme de bulletins Ronéo. Le 1er décembre 1940, paraît Libération Nord, feuille dactylographiée en sept exemplaires.

Pour l’imprimer, les difficultés sont inombrables. La pénurie de matières premières en est une. Loin d’en être uniquement une contingence matérielle, elle est organisée pour constituer un moyen de pression efficace des autorités allemandes et des agents chargés de leur répartition dont le choix privilégient qui bon leur semble. Très vite, pour enrayer la sorie de tracts et de publications anti-vichistes et antinazis, des mesures gouvernementales interdisent une Ronéo, de l’encre et du papier sans justification professionnelle; les fabricants, marchands et grossistes ne peuvent pas vendre sans une autorisation délivrée par le commissaire de police les appareils duplicateurs et les papiers, susceptibles d’être employés à la confection du tract ronéotypés (décret du 26 novembre 1940).

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Une femme sort d’une valise des numéros d’un journal clandestin

Strictement contingenté, le papier est souvent acheté au marché noir et représente un sacrifice financier important. Parfois, les imprimeurs parviennent à prélever sur leurs stocks la quantité nécessaire réservée aux feuilles clandestines. Les premiers écrits ont un aspect artisanal, des chaînes se constituent spontasnément pour reproduire, souvent à la main, les Conseils à l’occupé ou les discours de la radio de Londres. Ces feuilles sont parfois ronéotypées, dactylograpiées, rarement imprimées. L’Humanité clandestine paraît dès août 1940, grâce à des centres ronéo, légers et mobiles. Une étape difficile est franchit en 1941 au moment de l’organisation de groupes qui trouve leur raison d’être autour de la publication d’un journal. C’est le cas de Libération Nord créé à l’origine par Christian Pineau et dont le 1er numéro dactylographié était sortie le 1er décembre 1940. Libération Sud est publié en juillet 1941 par Emmanuel D’astier et son équipe et imprimé à Clermont-Ferrand à 15 000 exemplaires. Le premier numéro de Défense de la France sort à Paris le 14 juillet 1941 à 5000 exemplaires et le premier numéro des Cahiers du Témoignage Chrétien du Père Chaillet en novembre 1941 d’une imprimerie lyonnaise.

En décembre  trois grands journaux de la Résistance font leur apparition : Socialisme et Liberté (qui deviendra Le Populaire Z.N.); Franc-tireur imprimé à Lyon et dont le fondateur est Jean-Pierre Lévy; Combat, issu de la fusion Liberté de François de Menthon et de Vérités d’Henri Frenay. L’éclosion de la presse clandestine se poursuit tout au long de l’année 1942. Le Populaire zone sud en mai avec Daniel Mayer, Lorraine en août 1942 et Résistance, le nouveau journal de Paris dû au docteur Marcel Renet. En août 1943, la presse résistante est devenue une force avec laquelle il faut compter. Elle atteint ses plus forts tirages en 1944, dépassant les deux millions d’exemplaires (le no 43 de Défense de la France du 15 janvier 1944 tire à 450 000 exemplaires) Plus de 1 200 titres sont alors recensés. À côté des feuilles nationales, existent des feuilles locales et professionnelles dont un grand nombre est dû aux communistes.

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Une de Combat, en août 1942, Le Franc-Tireur, avril 1942, Librération du 14 juillet 1942

Cette réussite est d’autant  exceptionnelle que, tout au long de ces quatre années, les responsables de cette presse se heurtent à d’innombrables difficultés. Que le journal soit imprimé ou non, sa réalisation s’avère un véritable tour de force. Un grand nombre de feuilles locales ou visant un public déterminé sont multipliées, ronéotypées ou dactylographiés. Les publications sont en français mais il y en a aussi en allemand, alsacien, italien, yiddish ou espagnol. Sortir de l’isolement, diffuser sur une vaste échelle et régulièrement, ne serait-ce qu’une feuille recto-verso, c’est déjà laisser croire qu’une force politique, qu’une organisation structurée et influente s’oppose à la politique de collaboration. Ainsi, apparaît en filigrane l’idée de fabriquer un journal, d’élargir l’impact de la Résistance. En 1943 et 1944, on ne compte plus les emprunts forcés vols de machines à écrire, notamment dans les administrations, ou d’appareils à dupliquer. Quant aux journaux imprimés, ils exigent une série d’opérations spécialisées (composition, tirage) d’autant plus risquées que les imprimeries font l’objet d’une étroite surveillance policière. Certains ouvriers typographes composent chez eux la nuit ou en cachette sur leur lieu de travail; il faut ensuite porter les plombs à l’imprimerie, où s’effectue le tirage. La liste des petits artisans imprimeurs qui viennent en aide aux mouvements de résistance est impressionnante.

Souvent le même homme rend service à plusieurs journaux à la fois. La police cherche à localiser les lieux et les dépôts d’impression de la presse clandestine. Une ordonnance allemande du 18 décembre 1942 précise que : Quiconque aura confectionné ou distribué des tracts sans y être autorisé sera puni de peine de travaux forcés et les cas graves de peine de mort. La Milice est un auxiliaire précieux des Allemands et le nombre d’arrestations et de déportations est en constante augmentation. Pourtant, malgré la menace, quand une imprimerie est démentelée, un autre artisan prend la relève.

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Imprimerie de Défense de la France, rue de l’Université à Paris

De la presse clandestine à l’édition littéraire de la Résistance

Grâce à des imprimeurs devenus résistants, des journaux comme  Franc-tireur, Témoignage Chrétien ou Libération ont recours à des professionnels; la presse communiste, celle du Front national et la presse syndicale s’appuient, elle, essentiellement sur des ouvriers typographes militants ou syndicalistes. D’autres tout comme Défense de la France ou Combat créent leur propre imprimerie. L’imprimeur Jacques Grou-Redenez apprend aux étudiants du mouvement Défense de la France à composer les articles avec les caractères typographiques et Alain Radiguer leur enseigne les techniques de fabrication de reproduction de clichés. Pour Combat André Bollier crée une imprimerie à Lyon, en Achetant une machine à Grenoble : comme elle est intransportable en l’état André Bollier la démonte et oganise le transport de pièces par l’intermédiaire de différentes entreprises de camionnage. Pour des raisons de sécurité, les éléments sont réceptionnés dans la banlieue lyonnaise en divers lieux, puis quelques semaines plus tard, centralisés rue Viala, à Lyon. Sans plan ni croquis André Bollier reconstruit la machine de mémoire.

En dépit des arrestations, les journaux dont le format est réduit et le nombre de page limité, paraissent avec une quasi-régularité. Comme les tracts, ils ont un rôle essentiel de mobilisation et de recrutement : il s’agit de créer un lien avec les lecteurs, tout en menant une véritable bataille contre l’occupant et la censure.

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Tract réalisé par Lise London appelant les mères françaises à se mobiliser contre l’occupant mai 1942

Fondées en 1942 par le romancier Pierre de Lescure et le graveur Jean Bruller dit (Vercors), les éditions de Minuit sont la maison d’édition littéraire de la Résistance. Le premier titre, publié le 20 février est le Silence de la Mer de Vercors. Les millieux littéraires sont surpris par la qualité de la publication. Les ennuis de Pierre le Lescure avec la Gestapo au printemps 1942 le tiennent éloigné de Paris alors qu’il est essentiel d’alimenter en textes les Éditions de Minuit afin qu’elles ne soient pas contraintes d’intérrompre leur activité. En son absence, Jean Paulhan, l’ex-directeur de la Nouvelle Revue Française, contacté par Vercors, les prend sous sa protection et leur fait parvenir des textes d’écrivains dont il connaît les convictions patriotes. C’est alors que paraissent Le Cahier noir de François Mauriac, sous le pseudonyme de Forez, Le Musée Grévin de Louis Aragon, sous celui de François la Colère, l’Honneur des Poètes, avec en particulier des poèmes de Paul Éluard, sous son propre nom, de Pierre Seghers.

Pendant cette période, les poètes (Louis Aragon, Paul Éluard, Robert Desnos) trouvent un public. Les lecteurs devinrent le sens caché des symboles et des images dont ils usent pour dire que la situation ne leur permet pas d’énoncer en termes clairs. La poésie s’avère une arme de combat. L’occupant discerne difficilement sous la fable le sens réel du propos, mais les journalistes parisiens qui travaillent à sa solde dénoncent cette littérature dans leurs colonnes. Le 31 octobre 1943, prononçant un discours à Alger, le général De Gaulle rend hommage aux écrivains français de la Résistance et à ses poètes : un jour l’historien constatera que la Résistance, c’est-à-dire l’espérence nationale s’est accrochée sur la pente à deux pôles qui ne cédèrent point. L’une était le tronçon de l’épée et l’autre la pensée française, la dignité de l’esprit fut sauvegardée malgré toutes les épreuves.

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Revue Les Lettres françaises, mars 1944

À la Libération, la poésie des années de la censure se révèle peu à peu au grand public. Le mouvement poétique se poursuit et les maisons d’éditions se multiplient. Les journaux et les magazines publient des poèmes, envoyés notamment par les lecteurs, qui expriment ainsi leurs sentiments et opinions.

Pendant toute la période, la presse clandestine, originalité de la Résistance française, à joué un rôle essentiel auprès de l’opinion publique. Elle a contribué à l’igitimer le discours résistant et montré le pouvoir de pénétration de la Résistance. L’un des premiers actes du gouvernement de la France libre est le rétablissement de la liberté de presse et de l’information. Le principe en est proclamé par le Comité français de Libération national dans l’ordonnance du 6 mai 1944 sur le régime de la presse en temps de guerre.

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Impression d’un appel des FFI à l’insurrection Paris, août 1944

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Quelques titres des Éditions de Minuit

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Jean Bruller dit (Vercors)


20/12/2013
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OPÉRATION AMHERST LES SAS FRANÇAIS EN HOLLANDE

Les français du Special Air Service furent les premiers combattants de l’opération Overlord à être parachutés dans la nuit du 5 au 6 juin 1944 sur la Bretagne. Ils y installèrent deux bases qui accueillirent de nombreux soldats et résistants. Jusqu’en 1945, les SAS français vont se couvrir de gloire, notamment lors de l’opération Amherst en Hollande, la dernière qu’ils mèneront pendant ce conflit.

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Soldats français parachutistes photographiés en Angleterre à la veille de leur largage dans la nuit du 7 au 8 avril 1945

À la fin du mois de mars 1945, les alliés poursuivent leur avance sur tous les fronts européens. Cependant la résistance allemande reste forte. Placés depuis peu sous les ordres du général Cavert, la brigade des Special Air Service (SAS) reçoit l’ordre, le 28 mars, de préparer une intervention en Hollande, en avant des troupes canadiennes qui sont alors bloquées dans la région de Coevorden, Cette opération baptisée Amherst, est confié aux deux unités françaises des SAS. Elles ont pour objectif de créer un maximum de confusion parmi les troupes allemandes dans le secteur de Groningen-Coevorden-Zwolle et de harceler leurs moyens de communication. Elles doivent aussi contrôler certains nœuds de communication routiers et empêcher la destruction des ponts sur les canaux, s’emparer de l’aérodrome de Steinwijk, soutenir la résistance locale, signaler des objectifs à l’aviation et communiquer à l’état-major canadien le maximum de renseignements sur le dispositif ennemi.

Leur mission est prévue pour durer  entre deux et trois jours. Les combattants sont en possession d’un texte signé par la reine Wilhelmine des Pay-Bas qui leur permettra de prendre contact avec les civils et la résistance locale. De dix en temps normal, les effectifs des sticks sont portés à quinze avec la possibilité sur place de les subdiviser en sticks autonomes. Dans la nuit du 7 au 8 avril 1945, plus de sept cents hommes des 3e et 4e SAS, largués par 47 avions, sont parachutés sur une région sillonnée de canaux et de fossés, parsemée de nombreuses fermes où les zones boisées sont rares. Du matériel et des vivres sont également largués sur la zone d’intervention. Pendant ce temps, des centaines de manequins de faux parachutistes sont lancées dans de nombreux autres endroits afin de tromper l’ennemi. Parachutés à 600 mètres d’altitude au lieu des 200 mètres habituels, a cause d’une épaisse couche nuageuse habituels, les hommes rencontrent des difficultés de regroupement au sol au point prévus. Deux d’entre-eux, tombés sur une route fréquentée par des convois allemands, doivent s’éparpiller. De plus les SAS français se trouvent dans une zone frontalière de l’Allemagne où les nazis locaux, particulièrement nombreux, ont constitué des milices. Malgré tout, l’effet de surprise joue : un poste de commandement est attaqué en plein jour par des SAS. Des combattants isolés harcèlent l’ennemi. Certains contrôlent les axes routiers et font de nombreux prisonniers. La mission de nombreux SAS va cependant se poursuivre pendant plus d’une semaine en raison de la lenteur de la progression des troupes canadiennes.

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L’ennemi se montre tenace et agressif. Il provoque la mort de 33 combattants parmi les SAS notamment sept sont fusillés et d’autres brûlés vifs dans une grange, où sans doute à la suite d’une trahison, ils sont cernés mais refusent de se rendre. Le Stick 7 compte un mort et cinq blessés lors de combat dans un bois. Deux prisonniers sont fusillés le lendemain par les Allemands. Une centaine de combattants sont blessés et 86 disparus. Certains prisonniers en Allemagne, parviennent à s’évader. La plupart des missions sont remplies avec succès malgré le retard des troupes canadiennes. Du côté des civils néerlandais qui avaient aidé les SAS, cinq sont arrêtés et un sixième abattuts. La mission Amherst est la dernière des parachutistes français libres du Special Air Service. À Assen et à Westerbork, plusieurs plaques et un monument rappellent ces combats.


14/12/2013
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SEPTEMBRE 1939 OFFENSIVE DE LA SARRE

Sur la base de la convention militaire de 1936, le général Gamelin, commandant en chef des forces armées terrestres déclencha une opération sur le front ouest, dans la région sarroise, enfin de soulager l’armée polonaise. Si, au départ il avait été étudié la possibilité d’aider les polonais par des bombardements alliés sur les troupes allemandes engagées en Pologne, cette stratégie avait été vite écartée. Dans l’idée de Gamelin, la Pologne avait déjà perdu la bataille, mais il était certain qu’à l’issue de la guerre, qui allait être longue et coûteuse en hommes et matériels, elle renaîtrait. Aussi, jugeait-il inutile de mener une offensive qui pourrait provoquer des dégâts importants dans les rangs de l’armée française.

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Soldat français du 151e régiment d'infanterie de la 42e division d'infanterie dans le village allemand de Lauterbach le 9 septembre 1939.

En même temps, il fallait faire un geste vis-à-vis de la Pologne, en raison de l’opinion publique qui ne comprendrait pas l’attentisme des Alliés. C’est pourquoi les responsables militaires français décidèrent de lancer une offensive en Sarre dans la zone située entre la ligne Maginot et la ligne Siegfried avec arrêt devant cette dernière. Mais rien n’était prêt pour cette offensive et Gamelin donna l’ordre d’aller le plus vite possible par crainte qu’à leur retour de Pologne, les forces allemandes contre-attaquent par le Luxembourg, voire par les Pays-Bas et la Belgique. Menée par le 2e groupe d’armée, l’opération devait aboutir à une sorte de rectification du front, pour résorber deux saillants, celui de la Warnrdt et celui de Blies.

Partant de la zone française, en avant de la ligne Maginot, les unités s’ébranlèrent dans la nuit du 5 au 6 septembre et avancèrent dans la partie que l’ennemi avait évacuée et piégée, perdant des hommes victimes de mines. Le 8 septembre, la 3e division de cavalerie reçut la mission de couvrir l’ouest du flanc gauche de la 3e armée entre la Moselle et la Nied. La forêt de la Warndt fut prise par la 42e division d’infanterie tandis que la 4e armée occupait les villages de Carlsbrunn, Saint-Nicolas, et que la 3e prenait Biringen. Le 9 se déroulèrent divers combats d’infanterie où canons et mitrailleuses entrèrent en action. Les Français passèrent la Sarre à Welferding. Des chars R-35 du 20e bataillon de chars de combat progressèrent au nord de Bliesbrück : 4 sautèrent sur des mines. Le lendemain, les Allemands contre-attaquèrent, s’emparant du village d’Apach que les Français reprirent le soir. Le 32e régiment d’infanterie conquit la localité allemande de Brenschelbach. Le 11, le 32e régiment d’infanterie perdit encore treize hommes. Au soir du 12 septembre, le 2e groupe d’armée s’empara de plusieurs villages allemands.

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Des R-35 du 5e BCC dans la forêt de Warndt.

Ne voulant pas couper l’armée française de ses bases arrières, le général Gamelin fit stopper l’offensive qui avait permis de conquérir un territoire de 25 km de long à 8 km de large. À Abbeville, dans la Somme, se tint la première réunion du Conseil suprême de guerre allié réunissant Daladier, président du Conseil, Chamberlain Premier ministre britannique, l’amiral Chatfield, le général Ismay; la décision du général Gamelin de ne pas attaquer à l’ouest fut approuvée.Le 17 septembre, l’URSS entra à son tour en Pologne, Varsovie capitula le 27 et le 29, un traité germano-soviétique entérinait le partage de la Pologne entre ces deux puissances. Le 30 la 3e armée française avança encore près d’Uberherrn avant que le général Georges, chef des 1er et 2e groupes d’armées Nord-Est. Prît la décision de replier de nuit les unités des 3e, 4e, et 5e armées derrière la ligne Maginot pour le 4 octobre. En effet la crainte du commandement français était de voir surgir des chars ennemis, voire l’aviation, ce qui l’aurait obligé à mettre des moyens plus importants et faisait courir le risque de perdre du matériel, notamment des avions domaine dans lequel la France, alors en retard, espérait se remettre à niveau au printemps 1940. Enfin, le commandement ne voulait pas donner l’impression d’une retraite précipitée, ce qui aurait fait le plus mauvais effet sur l’opinion. En cours de décrochage, les dernière petites unités françaises subirent des contre-attaques ennemies.

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Des soldats de la 42e DI à Lauterbach, dans la Sarre, le 9 septembre 1939.

À la mi-octobre l’opération en Sarre était terminée. Environ 2000 soldats français y avaient été tués ou blessés.


14/12/2013
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L’ARMÉE POLONAISE EN 1939, RETOUR SUR UNE LÉGENDE

L’idée est encore répandue qu’en 1939 l’armée polonaise était une force totalement archaïque. Cette assertion renforcée par la légende tenace des charges des lanciers polonais contre les chars allemands, qui n’ont jamais eu lieu, mérite d’être nuancée.

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Chasseurs polonais PZL P24 contre les Stuka allemands au-dessus de la Pologne en 1939

Certes, l’armée polonaise fut rapidement écrasée par le Blitzgkreig allemand, et après le 17 septembre, par l’Armée rouge. Pourtant, les polonais ont combattu de façon beaucoup plus moderne que ne laissait entendre la propagande allemande en véhiculant une fausse image; les têtes de paille polonaise chargeant les Panzers avec leurs lances. Restaurée après 1918, la Pologne dut construire son économie national à partir de trois systèmes différents (russe, allemand et austro-Hongrois) et combler les pertes subie pendant la Grande Guerre; beaucoup d’usines, démontée par les Russes avaient quitté le territoire polonais en 1915. L’industrie d’armement (une vingtaine d’usines construites à partir de 1923 et contrôlées par l’État) n’était pas en mesure de satisfaire la demande, surtout dans le domaine des avions, des automobiles et des blindés. La motorisation de ce pays essentiellement agricole et la modernisation de son armée s’avéraient lentes et complexes. En 1935, année de la mort du maréchal Pilsudski, la Pologne ne comptait que 24 820 véhicules de tous types. À la même époque, la France en avait 2036 000, l’Allemagne 937 000, l’URSS 180 000 et même la petite Tchécoslovaquie 112 000.

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L’infanterie polonaise en 1939

La modernisation s’accéléra après la mort de Pilsudski, qui tout en comprenant sa nécessité, il n’y avait pas vu une priorité; il fallait d’abord organiser la jeune armée et la crise économique réduisait les possibilités financières de l’État. En 1936, un plan sexennal de développement et de modernisation fut élaboré, parallèlement à la construction de vingt et une usines d’armement dans une région éloignée de la frontière allemande et appelée Région centrale industrielle. La première étape du plan avait pour objectif la modernisation de l’armement, de l’organisation et de l’équipement technique de l’armée, l’augmentation de la puissance de feu de l’artillerie, le développement de l’aviation et l’agrandissement des réserves de munitions. Selon l’historien Piotr Stawecki lors de la deuxième étape, dix divisions d’infanterie de réserve devaient être formées en supplément. On prévoyait la modernisation du matériel et de l’armement des divisions d’infanterie déjà existentes, la motorisation partielle de la cavalerie, le développement de l’artillerie, surtout de l’artillerie antichar et antiaérienne, des unités de transmission, du génie et de la marine de guerre.

 On prévoyait aussi la formation d’unités blindées et motorisées, et il était aussi question d’augmenter les réserves en armes et en matériel de guerre, susceptibles de satisfaire les besoins de l’armée, correspondant à six mois d’opérations militaires. Entre 1933 et 1939, le Troisième Reich a dépensé pour l’armement trente fois plus que la Pologne et soixante fois plus dans la période de 1938-1939. En effet étant donné les restrictions budgétaires, les changements ne pouvaient pas être rapides. En 1939, la cavalerie représentait 10,8% de toute l’armée, l’infanterie 49,3% l’artillerie 14,9% l’armée de l’air 3,8%, les forces blindées 2,9%, la marine 2,3% et les autres 16%. Dans la Wehrmacht. Ces chiffres étaient respectivement de 2,1% et 43,5% dans l’Armée rouge 6,2% et 43,5% et dans l’armée française 6,4% et 52,5%. Si leur production était de qualité, les nouvelles usines polonaises ne pouvaient cependant fournir que de faibles quantités de matériel. Ainsi en 1939, sur 800 chars, seul 120 7TP polonais et 49 R-35 fournis par la France pouvaient combattre à égalité avec les Panzers. Et parmi 400 avions de première ligne, seul 36 bombardiers Los étaient de dignes aversaires de la Luftwaffe. Parmi d’autres armes de qualité citons le canon antichar 37 mm le canon antiaérien 40 mm (Bofors) et la carabine antichar de 35 UR 7,92mm, capable de percer un blindage de 15 mm.

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Char léger polonais 7TP.

La même année, l’Armée rouge possédait plus de 10 000 chars, la Wehrmacht 4300 et l’armée française environ 3500. Contrairement à ce que dit la légende, l’armée polonaise, surprise par la guerre alors qu’elle était en pleine modernisation suffisante, ne chargeait pa les chars à cheval.  Cependant faute d’une motorisation suffisante, elle les combattait à pied. Avant de capituler, elle a pourtant causé 50 000 pertes chez les Allemands (dont 1500 tués), abattu 285 avions et épuisé les réserves matérielles d’Hitler pour quelques mois.


14/12/2013
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